Professeur vacataire, je coûte une misère à la fac française

Publié le par s

[ Témoignage publié sur : http://www.rue89.com/2011/11/02/professeur-vacataire-je-coute-une-misere-a-la-fac-francaise-182835 ]

 

Je suis chargé de TD vacataire en langues étrangères appliquées (LEA) à l'université de Paris IV-Clignancourt, et avant cela chargé de TD en droit à l'université de Paris I.

J'ai été embauché pour donner des cours d'anglais à des élèves de première et deuxième année d'université (étant moi-même actuellement en train de finir ma thèse en littérature américaine).

Pas une fois on n'a testé mon niveau d'anglais à l'écrit ou à l'oral, et je n'ai jamais passé d'entretien d'embauche – l'envoi de mon CV et d'un « mail de motivation » a suffi dans les deux cas.

Ma supérieure à Paris I m'avait confié que je remplaçais une chargée de TD dont on avait « découvert » au bout d'un an qu'en guise de cours, elle apprenait des chansons en anglais à ses étudiants. Il n'y a donc aucune garantie ou presque, du côté des élèves, d'avoir à faire à des enseignants compétents ; cela peut leur coûter un an d'études à apprendre n'importe quoi.

Moins d'heures qu'un titulaire, et moins payé

Mais, pis que cela, ce sont les conditions de contrat et de paiement qui m'effarent. En tant que vacataire, je n'ai le droit de dispenser que 96 heures de cours par an (soit environ quatre heures par semaine pendant une année universitaire), cela parce que je n'ai pas (encore) de qualification type Capes ou agrégation.

Cette mesure est censée être mise en place pour favoriser l'emploi des titulaires, mais dans les faits, je constate que les positions vacataires se multiplient. D'autant que je suis moins payé qu'un titulaire, parfois pour faire exactement la même chose que lui. Il faut également savoir qu'un vacataire n'est payé que trimestriellement, c'est-à-dire, normalement, en janvier et en juin.

Un de mes camarades, qui n'avait pas été mis au courant de cette fameuse limite de 96 heures, a donc travaillé bien plus, et au final,l'université a dû l'informer qu'elle ne pourrait pas lui payer plusieurs mois d'enseignement. Cela non par malice : l'université elle-même semblait peu informée de cette limite.

Le responsable pédagogique chargé de mon recrutement m'avait lui-même laissé miroiter bien plus d'heures d'enseignement, avant que je ne sois contacté par le responsable administratif de l'université, qui m'a appris cette limite horaire pour les enseignants vacataires.

Les contrats de travail ? Pas pour les vacataires

A Paris IV, on m'a fait comprendre qu'il n'y avait pas de contrat pour les vacataires. Je cite le mail d'un responsable administratif :

« Dans la pratique, il n'y a pas véritablement de contrat de travail au sens propre dans notre Université pour les vacataires de l'enseignement.

Celui-ci est remplacé par l'état de service que je vous ferai parvenir en janvier sur la base d'une déclaration d'heures dispensées, de votre part, et de l'arrêté de paiement qui sera signé par la direction de l'UFR au cours de la même période, et qui entraînera le paiement de vos heures. »

 

Il me semble bien que ce fait, outre qu'il est inacceptable, est également illégal. Cela veut aussi dire que s'il m'arrivait un accident pendant un cours (par exemple, un étudiant agressif qui s'en prend à moi) je ne serais absolument pas couvert.

Publié dans Articles de presse

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